Ce
pays est magique. Sa magie réside dans le fait qu’il recèle nombre de
phénomènes fort contradictoires, mais qui, dans l’ensemble produisent le Maroc actuel.
Cette magie a encore frappé aujourd’hui : En voulant intervenir pour
arrêter des agents des forces de l’ordre qui tabassaient sauvagement des
diplômés chômeurs, un parlementaire du PJD s’est fait rudement tabasser et
humilier à son tour. Dévoiler son identité d’avocat, de parlementaire du PJD et
de membre du bureau exécutif d’un forum défendant la dignité des citoyens ne
lui a valu qu’un acharnement de la part des policiers. Cerise sur le gâteau, le
député a eu droit à un déluge d’insultes et a failli être embarqué selon son témoignage.
Cet
accident, fort regrettable pour tout citoyen marocain indépendamment de son
appartenance, nous amène à reconsidérer pour la énième fois le comportement de
la police à l’égard des marocains durant les manifestations à caractère
pacifique.
La
loi en vigueur stipule en effet que les autorités chargées de disperser une
manifestation pacifique devraient annoncer leur intervention clairement deux
fois via mégaphone avant d’intervenir. En cas d’intervention, tout « abus
de violence » devrait être évité et l’on devrait se maintenir au premier
objectif : disperser la manifestation. Sur le terrain c’est une autre
histoire.
Les forces de l’ordre, sous les commandements
des supérieurs, ne se contentent pas seulement de disperser la manifestation,
mais poursuivent les manifestants dans les ruelles les tabassent sauvagement à
l’aide de leurs gourdins. Ajoutez à cela un florilège des insultes les plus
inouïes. Essayez d’appeler au respect de votre dignité et vos os auraient un
bonus de plus.
Revenons
à notre incident. Il serait judicieux dans ce contexte de rappeler les propos
de notre chef de gouvernement portant sur l’intervention des forces publiques.
Ce dernier affirmait avec vivacité que « les blessures enregistrées auprès
des forces de l’ordre dépassent parfois celles des manifestants » et qu’il
serait préférable de matraquer les citoyens au lieu de les poursuivre
légalement pour ne pas « faire souffrir leurs familles ».
J’aimerai
bien écouter notre chef du gouvernement justifier comment un parlementaire de
son parti a blessé les policiers avec sa carte d’identité, j’aimerai également
entendre la famille de la victime remercier avec zèle Benkirane de leur avoir
épargné de faire le tour des tribunaux. Ne parlons guère de ses pauvres
militants, diplômés chômeurs, imams ou docteurs qui ont goûté à la matraque. Ne
parlons guère du pauvre citoyen marocain devenu un sac de frappe à toutes les
occasions …
Cet
acte porte en lui une forte symbolique : un représentant du peuple ayant
prouvé son identité se fait expressément maltraiter devant le regard des
passagers au sein de la capitale du pays, à quelques mètres de l’enseigne où il
est censé défendre les citoyens qu’il représente. Vous l’aurez compris, devant
la matraque, tout le monde est égal. À défaut de partager les droits, on aura
au moins le privilège de partager la matraque. Il est à noter finalement que
M.Idrissi, le député concerné, affirmait il y a quelques semaines dans une
émission qu’il y avait une nette amélioration de la situation des droits
humains au Maroc. Venez, reparlez-nous de cette amélioration …